Le modèle

    En Belgique, le modèle Housing First se déploie depuis 2013 et fait état de résultats inspirants. En collaboration avec les régions compétentes, le SPP-IS coopère à la diffusion du modèle grâce au soutien apporté aux projets sur le terrain ainsi qu’au " Housing First LAB ".

    Le Housing First : un modèle d’innovation sociale

    Positionnant l’accès au logement comme un droit fondamental, le modèle Housing First propose un accès immédiat au logement, depuis la rue, sans étapes intermédiaires et sans autres conditions que celles (droits et devoirs) auxquelles est soumis un locataire. Ce modèle vient ainsi bouleverser la vision classique du processus d'insertion sociale, d'autant plus qu'il est destiné au public le plus éloigné du logement : un public particulièrement fragilisé par une chronicité de la vie sans domicile et des problématiques de santé mentale et d’assuétudes. Pour favoriser le maintien dans le logement et le rétablissement de la personne, le modèle prévoit un accompagnement adapté, intensif et pluridisciplinaire.

    Depuis son lancement à New-York au début des années 1990, ce modèle a été adopté comme politique régionale ou nationale dans plusieurs pays européens. Il permet en général un maintien en logement d’au moins de 80% des locataires. Cette stabilité résidentielle est non seulement favorable à un processus de rétablissement mais permet, en outre, de réduire une série de coûts non négligeables liés notamment aux usages intenses des services de santé notamment par les personnes sans-abri ne recevant pas ce type de d’accompagnement.

    Une première expérimentation en Belgique de 2013 à 2016

    En Belgique, c'est l’élaboration du Second Plan fédéral de lutte contre la pauvreté (2012) qui a créé les conditions permettant l'implémentation de pratiques Housing First sur le territoire. L'action 76 du Plan fédéral de lutte contre la pauvreté prévoyait ainsi « la mise en route d’initiatives inspirées de l’approche Housing First dans les cinq plus grandes villes du pays ».

    Pour opérationnaliser cette action, des acteurs publics et privés de Bruxelles, Anvers, Gand, Charleroi et Liège ont proposé d’associer leurs expertises et leurs réseaux afin d’expérimenter concrètement ces  pratiques Housing First.

    Grâce au soutien de la Secrétaire d’État, et via un subside de la Loterie nationale, l’expérimentation Housing First Belgium (HFB) a débuté en août 2013, pour une durée initiale de deux ans. Afin de consolider les premières observations et d’étendre le modèle, l’expérimentation a été reconduite une année supplémentaire (jusqu’en juin 2016) en incluant trois nouvelles villes de taille moyenne : Hasselt (CPAS et CAW), Molenbeek-Saint-Jean (CPAS avec Infirmiers de rue et SMES-B) et Namur (CPAS avec le Relais Social urbain namurois).

    Depuis les débuts du Housing First Belgium, les projets se réfèrent au guide Housing First européen, élaboré par la Feantsa et déjà traduit en français et en néerlandais. 

    Nous vous invitons à le consulter dans la rubrique "Documents". 

    Housing First : ça marche !

    Parallèlement à cette première expérimentation, et dans une logique d’« evidence based policy », une étude a été menée durant 24 mois afin de mettre en évidence les conditions d’implémentation (en termes d’efficacité et d’efficience) du Housing First en Belgique. Ainsi, une équipe d’évaluation a comparé les trajectoires de locataires accompagnés par les équipes HFB à celles de personnes sans-abri recourant au système d’aide classique. Les résultats ont démontré toute l’efficacité du modèle Housing First. En effet, plus de 93% des locataires étaient toujours en logement après deux ans d'expérimentation. En 2020, soit quatre ans après la fin de l’expérimentation, le taux de maintien en logement était toujours de 86%. Ainsi, malgré un profil très fragile, les personnes intégrées dans l’accompagnement Housing First démontrent jusqu’à aujourd’hui toute leur capacité à habiter.

    Vous trouverez plus d'informations sur le succès d'Housing First ainsi qu'un manuel de recommandations à l'attention des opérateurs de terrain dans l'onglet "Études" de cette page. 

    D’autres études européennes ont été menées et font état de résultats similaires. Voir : FranceEspagne.

    Le Housing First en Belgique aujourd’hui

    En 2022, plus de 25 projets Housing First sont actifs sur le territoire belge, chacun ancré dans un territoire et mettant l’accent sur ses propres priorités. 

    En Flandre, des projets existent notamment dans les villes suivantes : Anvers, Bruges, Genk, Gand, Halle-Vilvoorde, Hasselt, Courtrai, Louvain, Ostende, Poperinge, Roulers, Saint-Nicolas, Saint-Trond, Turnhout, ... . Dans certains cas, des projets sont menés par les CAW (Centrum Algemeen Welzijnswerk) , dont la fonction est plus large et couvre plusieurs municipalités : Caw Limburg, Caw De Kempen, W13, Thuis in het Waasland, … . 

    En Wallonie, ce sont principalement les Relais Sociaux qui portent les projets Housing First à Mons, Charleroi, Liège, Namur, La Louvière, plus récemment au Luxembourg et dans le Brabant Wallon. Les relais sociaux ont une zone de fonctionnement qui dépasse les frontières des communes.  Sur le territoire namurois,  l’asbl Les Trois Portes mène également un projet Housing First depuis 2022.

    Plusieurs projets coexistent sur le territoire de la région bruxelloise : le SMES, Infirmiers de Rue, Step Forward (New Samu Social), Station Logement (asbl Diogène), Antonin Artaud, et également les CPAS d’Anderlecht et d’Etterbeek.

    De nouvelles questions émergent constamment, que ce soit concernant l’accueil de publics spécifiques (femmes, jeunes, etc.) ou concernant la méthodologie Housing First (sorties du projet, travail sur l’affiliation sociale des locataires, etc.). Autant de défis pour l’avenir du Housing First en Belgique et autour desquels co-construire ensemble.

    Le Housing First Lab

    Le Housing First Lab représente le trait d’union entre les porteurs de projets dans les différentes Régions. Représenté par ses deux coordinateur.trices (FR et NL), il soutient et accompagne méthodologiquement tant les pionniers du Housing First Belgium que les nouveaux projets. En tant qu’expert HF au niveau national, il se porte garant d’une récolte de données actualisées sur le Housing First en Belgique et implémente les appels à projets HF émanant du niveau fédéral. Il veille à recueillir et à partager avec les différents acteurs HF belges les bonnes pratiques observées et rencontrées au niveau européen, et participe à disséminer les résultats belges à l’étranger. Il facilite l’accès à des formations/intervisions pour les équipes de terrain. Enfin, le HF LAB participe à la sensibilisation sur le Housing First des acteurs du secteur d’aide aux sans-abri. Il anime notamment les réunions de la Plateforme Housing First Belgium auxquelles participent de plein droit les administrations régionales compétentes pour la lutte contre le sans-abrisme.

    Le modèle Housing First : vers une solution structurelle dans la lutte contre le sans-abrisme ?

    Le modèle Housing First fait ses preuves. Aussi, il devrait idéalement passer d’un programme isolé destiné à un public limité à un modèle plus vaste permettant la transformation du système d’aide aux personnes sans-abri. De manière globale, il est sans conteste question de passer d’une gestion du problème du sans-abrisme à son éradication. Ce à quoi participe le Housing First, d’autant plus s’il est implanté à une plus large échelle (comme en Finlande où il a été implémenté à l’échelle nationale).

    Si d’un point de vue du logement, la priorité du modèle HF reste de favoriser l’accès à "un logement indépendant et permanent avec son propre bail", il existe plusieurs variantes de logement à travers les projets. Par exemple, des expériences de logements collectifs, avec l’accompagnement intégré, sont menées et font leurs preuves, en Belgique et à l’étranger. Aussi, pour favoriser la réussite du programme et donc soutenir les personnes dans le maintien en logement, des alternatives ont dû être trouvées afin que certains locataires bénéficient à la fois de leur propre espace, à loyer modéré, tout en restant bien intégrés dans le voisinage (ce qui représente encore un défi pour certains). Un certain nombre d'initiatives, telles que Skeave Huse (Finlande), existent déjà en ce sens. Dans tous les cas, et donc aussi sur la question du choix du logement, les besoins et envies de la personne restent au centre du dispositif Housing First : toute décision est prise avec la personne concernée ou en consultation avec elle, et non pas uniquement par des professionnels.

    En effet, l’un des principes fondamentaux du Housing First est que les personnes déterminent elles-mêmes comment elles veulent vivre et être soutenues. Il est donc question de s’engager toujours plus avec les gens, non pas en faisant pour eux mais bien avec eux. En cela, il est aussi question de changer les attitudes générales à l'égard des personnes qui se retrouvent sans domicile. Le Housing First est ancré dans la prise de conscience que le sans-abrisme est avant tout un problème de logement et une défaillance du système. Le fait de le reconnaître et de le souligner permet de lutter contre la stigmatisation à l’encontre des personnes sans-abri..

    Il est évident qu'en raison de facteurs externes, les principes du Housing First ne peuvent pas toujours être mis en œuvre immédiatement. Cela ne doit pas entraver le travail sur le terrain qui est un processus inscrit sur le long terme. Avec un si grand nombre de personnes sans abri ou risquant de le devenir, nous ne pouvons pas nous permettre de revoir nos ambitions à la baisse. L'approche fondée sur les principes du "Housing First" doit avant tout fournir une large base pour une politique et une mise en œuvre qui éliminent réellement le sans-abrisme, tout en laissant suffisamment de créativité et de flexibilité au niveau local dans la mise en œuvre des projets.

    Nous savons maintenant, grâce à différentes recherches fondées sur des preuves de terrain, que le Housing First fonctionne et qu'il constitue donc la meilleure utilisation de fonds publics limités dans un contexte de crise sociale qui, elle, s’intensifie. Aussi, l'apprentissage mutuel et le partage des connaissances reste fondamental pour l’implémentation de cette philosophie.

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