Plus que fournir un logement... l'attitude d'abord

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(le texte ci-dessous a été adopté et traduit avec l'approbation des collègues de Housing First Netherlands)
Comment Housing First fait-il la différence ? Grâce à l'amour et au courage des équipes Housing First, qui sont très engagées et motivées ! Housing First n'emploie pas de travailleuses et travailleurs sociaux, mais des personnes qui s’engagent dans une relation et apportent du soutien. C'est ce qui fait toute la différence. En enlevant cette veste de ‘travailleur ou travailleuse sociale’, la personne bénéficiaire peut enlever sa veste de ‘client ou cliente’. Cela normalise la relation mutuelle et encourage un contact, un comportement et un rétablissement sains. Housing First est basé sur l'acceptation inconditionnelle et la confiance. Plus d'une décennie d'expérience nous a prouvé que cette approche est fructueuse…
La relation est au cœur du Housing First
Le conseiller travaille à partir de la relation personnelle. Housing First est avant tout une approche relationnelle. La recherche montre également que ce n'est pas la méthodologie, mais la relation personnelle entre le ou la conseillère et le ou la participante qui détermine le succès du programme. Dans le cadre de Housing First, une grande attention est donc accordée à l'adéquation entre ces personnes. Tant au début du programme que tout au long de celui-ci. En effet, les gens évoluent constamment et peuvent avoir besoin de quelque chose de différent à différents moments.
Une personne qui travaille pour Housing First est une personne qui pense librement. Les principes fondamentaux du Housing First aident les accompagnateurs et accompagnatrices à réfléchir à leur travail, mais ne fournissent pas de solutions toutes faites. Travailler selon les principes Housing First implique donc beaucoup plus de recherche et de réflexion. Vous ne savez pas à l'avance ce que vous allez déployer et par quelles étapes vous allez passer. Il s'agit toujours d'un travail sur mesure et jamais compartimenté. Housing First s'adapte aux bénéficiaires, et non l'inverse. Ce qu'il faut faire ou ne pas faire dans le cadre de l’accompagnement, vous l'apprenez dans le cadre de la relation que vous entretenez avec la personne.
En tant que travailleur ou travailleuse Housing First, vous avez une force professionnelle. Les balises telles que la formation préalable, les méthodologies et les réglementations ne sont pas délaissées, mais votre travail est toujours guidé d'abord et avant tout par la relation. Un participant au programme Housing First l'a exprimé avec beaucoup de justesse en disant : "vous n'êtes ni un conseiller, ni un ami - mais quelque chose entre les deux".
En tant que personne qui soutient, vous savez qu'il est important de faire en sorte que la personne se sente avant tout le ou la bienvenue. Housing First dégage d'emblée la joie de savoir que quelqu'un est là, qu'une personne s'engage auprès de celui ou celle qu'elle conseille et qu'elle en prendra soin. Il y a de la place pour l'ouverture et la curiosité mutuelle. De plus, vous vous rendez accessible et disponible.
Rétablissement et espoir
Housing First consiste davantage à donner de l'espoir qu'à apporter de l'aide. En tant que personne qui accompagne, vous croyez sincèrement que chaque personne a la possibilité de se rétablir, même si la route est parfois longue. Traditionnellement, le conseil consiste à contrôler et à protéger, à limiter les risques autant que possible. Le Housing First délaisse la peur au profit de l'espoir, de la confiance et de la positivité. Il se concentre sur ce qui est possible, où aller et comment réaliser quelque chose de nouveau ensemble. La prise de risques fait partie de cette démarche, elle offre en fait des opportunités de croissance. Comme l'a dit un participant au programme Housing First : "Mon accompagnateur avait une telle confiance en moi qu'au bout d'un moment, j'ai commencé à croire en moi. Même après des rechutes et des échecs, j'ai continué à recevoir des conseils affectueux et chaleureux. Cela m'a permis de commencer à croire en une vie différente pour moi-même". Housing First reste toujours dans une perspective d'espoir. On ne juge pas et on donne des opportunités. Gardez toujours la foi dans la personne que vous accompagnez et dans un cheminement positif.
Vous et moi
La relation classique entre la ou le conseiller et la ou le bénéficiaire est strictement centrée sur ce dernier et sa demande d'aide. La personne s'y soumet et s'immisce le moins possible dans la vie du bénéficiaire. On nous a tous et toutes appris à l'école à adopter une distance professionnelle. L'approche Housing First met l'accent non plus sur l'individu mais sur la relation ; elle construit une relation qui fonctionne pour les deux parties. Et elle recherche un dialogue franc et permanent. Il s'agit d'une proximité professionnelle.
L'authenticité est une exigence clé dans le processus de sélection d'un ou d’une travailleuse Housing First. Il faut avoir une expérience (de la vie) et être conscient de notre propre histoire, de nos schémas et de nos peurs, et de la manière dont ils peuvent jouer un rôle dans notre travail. Il est normal que les travailleurs et travailleuses aient aussi des peurs et des préjugés, car après tout, cela nous traverse tous et toutes. L'astuce réside dans ce que vous choisissez de faire. Dans le cadre de l’accompagnement, on utilise ses propres expériences avec subtilité. La prise de conscience de sa propre vision du monde s'accompagne d'une prise de conscience du fait que l'autre personne voit également le monde en fonction de ses expériences passées. On se demande ce qui est arrivé plutôt que ce qui ne va pas. On accepte de ne pas être infaillible et de pouvoir se tromper. En assumant notre responsabilité personnelle, nous incitons nos locataires à faire de même.
Respecter et renforcer l'autonomie
Housing First part du principe que les travailleuses et travailleurs sociaux ne doivent pas réparer les gens. Il apprend aux gens à s'aider eux-mêmes. En outre, il abandonne l'hypothèse selon laquelle une ou un accompagnateur comprend les besoins d'une personne mieux qu'elle ne se comprend elle-même. La personne qui travaille dans le Housing First renonce à son rôle d'expert. C’est le ou la bénéficiaire qui est protagoniste ; Il part du principe que l'autonomie est le point de départ du rétablissement. Il repose sur la conviction que les gens ont la capacité de trouver des réponses à leurs propres questions et que le soutien doit leur permettre de le faire.
Housing First est mieux noté par les bénéficiaires que les autres services d'aide, parce qu'il écoute vraiment et accorde toute son attention et sa reconnaissance. Les équipes Housing First savent qu'il s'agit avant tout d'établir un lien, de rencontrer les gens là où ils sont, et non pas là où nous pensons qu'ils ou elles devraient être. Vous ne faites pas de suppositions, d'interprétations ou de diagnostics rapides. vous observez ouvertement, permettant à l'autre personne de se montrer telle qu'elle est. Ensuite, vous offrez une aide personnalisée.
Les choix finissent donc par revenir à leur place, c'est-à-dire aux personnes elles-mêmes. La personne qui travaille dans le Housing First peut abandonner son agenda à la maison et laisser les participant.e.s fixer leur propre programme. Les questions centrales du conseil sont les suivantes : comment voulez-vous vivre votre vie ? Et de quel soutien avez-vous besoin pour y parvenir ? Il est décidé quel soutien est reçu, par qui et quand.
Housing First estime qu'il n'appartient pas aux personnes professionnelles de déterminer pour quelqu'un d'autre comment vivre, habiter et se comporter. Les relations de pouvoir hiérarchiques sont donc écartées. Il n'y a pas de contrôle ni de sanction. L'accent n'est plus mis sur l'aide mais sur l'apprentissage en commun. L'autre est considéré comme une personne adulte capable et responsable et la personne qui l’accompagne n'adopte pas de position de surplomb ni de solution à des problèmes qui ne sont pas sollicitées.
Approche des droits de l'homme
Les équipes Housing First sont conscientes du rôle des droits humains dans leur travail. Ainsi, vous n'attendez pas de gratitude de la part d'une ou un participant. Vous comprenez que les gens ont droit à un logement, à des soins appropriés, à la participation et à l'autodétermination. De plus, les droits humains ne sont pas seulement un combat à mener dans des pays lointains, mais aussi près de chez soi. La promotion de la justice sociale est l'une des principales raisons pour lesquelles le "travail social" a été conçu il y a une centaine d'années. Ainsi, en tant que travailleurs ou travailleuse Housing First, vous ne contribuez pas seulement à la vie personnelle d'un ou une bénéficiaire, mais aussi à l'amélioration de la société.
Il s'agit là d'une tâche complexe. D'une part, travailler à partir d'un idéal et, d'autre part, être confronté à une pratique quotidienne qui n'est souvent pas encore conforme à cet idéal. Cependant, c'est précisément ce qui crée le talent de relier le monde de la vie du bénéficiaire au système du monde des organisations, des villes et des services publics. Les personnes qui travaillent dans Housing First repèrent ce qui pourrait être amélioré dans la pratique et peuvent aborder ces questions avec les partenaires de la chaîne, en collaboration avec les citoyens et citoyennes vulnérables.. En tant que tel, les travailleurs et travailleuses du Housing First ont une légère tendance à être activistes et engagées. Mais ces personnes sont conscientes que l'investissement dans la relation de travail avec l’ensemble des acteurs et actrices de terrain est au moins aussi important que l'investissement dans la relation de travail avec les bénéficiaires.
Une communication chaleureuse et honnête
La communication, dans le Housing First, est empreinte de respect, de chaleur et de compassion. Une ou un accompagnateur Housing First peut s'affirmer, car, comme dans toute bonne relation, la communication est honnête. Mais il ou elle n'est jamais coercitif. Si vous dites quelque chose, c'est de manière constructive et directe. Vous avez désappris à parler dans le langage problématique traditionnellement utilisé dans l’aide, tel que la focalisation sur les problèmes, ce que quelqu'un ne veut pas, les risques, les impossibilités et les échecs. Vous connaissez la puissance du langage de la solution, qui consiste à se concentrer sur l'avenir souhaité, sur ce que quelqu'un veut, sur les exceptions, sur les forces et les ressources, sur les possibilités et les succès des personnes. Vous courez consciemment le risque d'être parfois considéré comme "un cheveu dans la soupe" par d'autres partenaires de soins.
Travailler selon le principe du Housing First pose de nombreux dilemmes. En tant que personne qui accompagne, vous ne les résolvez pas seule. Vous les partagez avec vos collègues. Mais aussi avec le ou la participante. Vous ne parlez pas exclusivement de, mais toujours avec un ou une participante. Et donc aussi lorsque des problèmes se présentent.. Le ou la bénéficiaire est associée aux réflexions et aux dilemmes. Il y a un regard constructif commun sur ce qui s'est passé et sur ce qui empêche de rompre définitivement avec la vie de sans-abri. Ainsi, la personne elle-même commence à reconnaître les modèles de comportement qui l'entravent et s'engage à obtenir l'aide dont elle a besoin. Pour bien faire, l'équipe met l'accent sur la réflexion. Un environnement de travail est créé dans lequel les travailleurs et travailleuses osent se regarder honnêtement et examiner la situation.
Au sein de Housing First, on part du principe que les gens ont de bonnes raisons de faire ce qu'ils font. Chaque comportement est le meilleur choix pour quelque chose. Les équipes savent qu'il existe souvent des traumatismes sous-jacent non reconnus. Cela rend les personnes qui accompagnent plus douces et plus curieuses. Vous observez, écoutez et vous vous interrogez.
Faire ce qui marche
La personne qui travaille avec Housing First est une pragmatique. Nous pensons qu'il y a toujours quelque chose à découvrir. Ce faisant, vous faites preuve d'une flexibilité et d'une créativité considérables. Vous osez également sortir des sentiers battus. D'être un peu rebelle quand c'est nécessaire. Vous essayez d'étirer le système ici et là. Au sein de Housing First, vous ne cherchez pas à savoir "qui devrait le faire", mais "ce qui fonctionne le mieux à l'heure actuelle". Cela signifie que si, pour une demande de soutien spécifique, un ou une autre membre de l'équipe que la personne référente habituelle peut-être préférable pour le ou la participante, c'est ce qu’il faut faire.
Nous abandonnons également l'illusion de pouvoir prédire quoi que ce soit. La personne qui accompagne a développé une tolérance à l'incertitude. Elle est profondément consciente qu'il n'y a pas de vérité dans le monde. Ce qui est vrai aujourd'hui est totalement absurde demain. Elle n'est pas non plus accrochée aux diagnostics, mais s'intéresse aux personnes, à leur mode de vie et à leur vision du monde. Elle estime qu'il est au moins aussi important de prendre conscience du moment où une personne peut se débrouiller seule avec un soutien moins intensif que lorsqu’elle peut vivre de manière totalement indépendante et n'a plus besoin d'aide. D'ici là, la personne qui accompagne dans le Housing First restera présente, même s'il n'y a rien à résoudre. Être présente dans les bons et les mauvais moments, et pas seulement lorsqu'il faut "éteindre un feu". Être présente au moment où le besoin s'en fait sentir, être présente autant et aussi longtemps que souhaité.
Sources :
- Housing First Nederland gids - LIMOR
- Pathways Housing First – Sam Tsemberis
- Publicaties www.rokusloopik.com - Rokus Loopik
- Praktijkboek Presentie – Andries Baart, Elly Beurskens, Marije van der Linden
- Intentional Peer Support – Shery Mead
- Positieve Psychiatrie – Fredrike Bannink
- Trauma Informed Care